PARLEMENTS (histoire)

PARLEMENTS (histoire)
PARLEMENTS (histoire)

PARLEMENTS, histoire

Issu de la Curia regis (Cour ou Conseil du roi), le parlement est l’un des principaux rouages de l’administration centrale de la France d’Ancien Régime. En 1239, le mot parlamentum est employé pour la première fois pour désigner une session judiciaire du Conseil. Il n’avait auparavant que le sens très général de conversation, entrevue, assemblée. Ces «parlements» deviennent de plus en plus fréquents. La Cour de justice acquiert un siège fixe sous Saint Louis, à côté du palais royal et de la Sainte-Chapelle, au lieu même de l’actuelle cour d’appel de Paris. L’ordonnance de 1345 lui donne un personnel stable, spécialisé. Le mot de «parlement», qui avait longtemps désigné une session, s’applique désormais à une institution.

Le parlement français n’est pas une assemblée représentative, à la différence du parlement anglais qui correspond plus exactement aux états généraux ou provinciaux français. (L’administration judiciaire centrale en Angleterre se compose de deux cours: les Plaids communs et le Banc du roi.) Le parlement anglais eut, surtout au XIVe siècle, un véritable pouvoir législatif; il pouvait publier des «statuts». En France, il n’y eut jamais que des ordonnances royales. Cependant, au cours des siècles, les parlementaires français prétendirent jouer un rôle politique, devenir de véritables représentants de la nation, se flattant d’agir au nom de l’intérêt public.

Le parlement est avant tout l’organe essentiel de la justice royale. Il lui permet d’imposer sa souveraineté, de lutter contre les justices seigneuriales et ecclésiastiques en répandant à son profit l’idée féodale d’appel au suzerain.

Sa compétence est universelle au royaume jusqu’au XVe siècle, où sont créés les parlements de province, apparemment pour continuer les institutions régionales des anciennes principautés territoriales périphériques, en fait pour accroître la centralisation monarchique. Le premier parlement de province fut créé en 1420 par le futur Charles VII à Toulouse, Paris étant tombé aux mains des Anglais. À la fin de la guerre de Cent Ans, la Guyenne ayant été définitivement récupérée, Bordeaux eut son parlement (1463). Le Dauphiné, la Bourgogne, la Provence rattachés à la France eurent leur parlement respectivement à Grenoble (1453), Dijon (1477), Aix (1501). En 1515, François Ier élève au rang de parlement l’Échiquier de Normandie, et en 1554 Henri II transforme les Grands Jours de Rennes en parlement. Louis XIII ajoute ceux de Pau et de Metz, Louis XIV ceux de Besançon et de Douai, Louis XV celui de Nancy. Dans de petites provinces des Conseils souverains jouent le rôle de parlements au petit pied (Arras, Colmar, Perpignan, Bastia).

Les parlements jugent en appel les causes des juridictions seigneuriales et des tribunaux royaux des bailliages. Ils sont scindés en quatre chambres: la Chambre des enquêtes, qui instruit les affaires; la Grand-Chambre, qui rend les arrêts; la chambre de la Tournelle, qui juge au criminel et la Chambre des requêtes, qui juge en première instance les procès des grands personnages. Les effectifs (présidents, conseillers-juges, magistrats, auxiliaires) varient suivant l’importance du ressort: de deux cents à trois cents à Paris, une centaine dans les grands centres provinciaux, de trente à soixante dans les autres. Leur compétence est souveraine: seul le roi peut casser leurs arrêts par lettres patentes.

Possédant une compétence extra-judiciaire, le parlement enregistre les ordonnances royales lues en audience publique puis transcrites sur registre par un greffier. Les légistes peuvent alors signifier au roi si la loi est juste ou contre raison. Ils ont droit de remontrance. Le roi peut passer outre. Dans ce cas, il envoie des lettres de jussion ordonnant l’enregistrement. Le parlement s’exécute ou fait de «nouvelles et itératives remontrances». Le roi tient alors un lit de justice: il se rend au parlement en personne et donne ordre de sa bouche au greffier d’enregistrer. En dernier recours, le parlement dispose d’une arme gênante: l’interruption de justice.

Le roi finit toujours par soumettre le parlement. Si les offices de conseillers sont des charges vénales héréditaires, le roi s’est réservé la nomination des «têtes»: premiers présidents, procureurs, avocats généraux. Une partie des parlementaires visent la carrière de maître des requêtes et n’ont pas intérêt à indisposer ceux dont dépend leur avenir. À plusieurs reprises des parlements entiers furent exilés (Rennes et Bordeaux, en 1675, et d’autres au XVIIIe siècle), et les membres les plus récalcitrants emprisonnés.

Les cours remportèrent d’assez rares succès: elles ont favorisé des révoltes provinciales, donné le coup d’envoi de la Fronde. Elles furent réduites au silence par Louis XIV qui, de 1673 à 1715, leur enleva le droit de remontrance. Leur agitation devint incessante après 1750, contre l’antijansénisme de l’épiscopat, contre les Jésuites, avec l’affaire de La Chalotais et du parlement de Bretagne revendiquant de plus en plus fréquemment le contrôle des lois et de l’impôt. Les parlements en viennent à se considérer comme les dépositaires temporaires d’un droit qui n’appartient qu’aux états généraux. L’Ancien Régime finissant tenta de supprimer ces foyers d’opposition en instituant des juges appointés et révocables (Maupeou, 1771), en leur enlevant l’enregistrement des ordonnances (Lamoignon, 1788). Par faiblesse, Louis XVI abolit ces réformes.

Les parlements disparurent avec le régime qu’ils avaient contribué à affaiblir. La Constituante (décret du 16 août 1790) uniformisa l’administration judiciaire par la création de tribunaux composés de juges élus. La crainte de voir renaître les parlements empêcha même la création de tribunaux d’appel: les tribunaux de première instance des districts en firent office les uns pour les autres.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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